Dans les classements internationaux relatifs à l’éducation le rang de la France ne cesse de se détériorer. Ce n’est pourtant pas faute d’y consacrer de plus en plus de moyens, bien plus que les pays mieux classés.
La singularité française réside dans le fait que la politique de l’éducation y oscille entre la volonté de favoriser les meilleurs, et la velléité de combattre l’échec. Exhausser les talents et repêcher les traînards, ces deux politiques paraissent complémentaires et à première vue bénéfiques. En fait, elles se réalisent au détriment de la progression de l’ensemble des jeunes qui ne sont ni des surdoués ni des sous-doués. Cette classe moyenne forme la majorité des apprenants. Elle souffre d’être négligée au profit des excellentes têtes d’œuf avec lesquels l’écart ne cesse de croître, et la place en situation de médiocrité. Elle pâtit tout autant du nivellement par le bas qui en dévalorisant ses efforts les rend vains.
Dés le collège on crée des classes d’excellence, puis à l’étape suivante hors des grandes écoles point de salut. L’Allemagne qui ignore ces structures éducatives élitistes ne s’en porte pas plus mal. A l’autre extrémité, le rattrapage du peloton par les attardés consiste à ralentir celui-ci. Cette philosophie favorise, non pas l’individualisme qui peut s’épanouir à l’intérieur du groupe d’étude ou de travail comme dans la société Nord américaine, mais l’égoïsme forcené qui est la marque de notre élite; l’égoïsme des meilleurs, mais aussi celui de « l’élite des cancres » qui rejettent toute contrainte sociale.
L’élévation du niveau moyen qui permet aux individus de travailler en équipe et favorise la prise de conscience de l’interdépendance n’a dans la France éducative aucun défenseur, telle est sans doute l’aspect le plus pernicieux de l’exception française.
L’élite est un groupe d’individus qui se distingue par la conjonction d’une sélection des meilleurs, la détention d’un pouvoir déterminant pour le corps social et l’exercice d’un magistère moral. Qu’un seul de ces caractères fasse défaut et l’élite disparaît. Faute d’exemplarité morale, elle devient oligarchie; sans qualifications supérieures elle est médiocratie, et sans prise sur les décisions capitales elle verse dans l’impotence.
À ces trois égards, l’élite de France est en danger.
Dans ses différentes composantes, l’élite n’est plus en mesure d’exercer une exemplarité morale. Les élus semblent s’ingénier à se disqualifier chaque jour un peu plus, de sorte que le premier qualificatif qui leur colle à la peau est le triste « tous pourris ». Les hauts fonctionnaires ont perdu leur aura d’êtres désintéressés par leur gestion égoïste, inefficace et surfacturée qui consiste désormais à se servir des biens publics et non plus à servir le bien public. Les grands patrons n’ont plus depuis le 19ème siècle valeur de modèles sociaux, leur comportement dans l’époque récente n’a rien fait pour redorer leur blason. Restent les communicants qui continuent à influencer les esprits, mais leur marque est fugace et l’opinion volatile, car elle ne perçoit aucune cohérence dans les fatwas de ces ayatollahs des médias.
Quels sont les pouvoirs de l’élite française d’aujourd’hui ? Les politiques avouent leur impuissance face à la crise, à la mondialisation, à l’Europe, au terrorisme, au racisme… Les hiérarques de l’Etat n’ont plus de recettes miracle à proposer, ils proposent aux élus une boîte à outils qui tient plus du bricolage que la la politique économique. Les patrons ne songent qu’à ces horizons lointains où leur prise sur le réel n’est pas entravée. Les communicants, le quatrième pouvoir, n’est plus bon qu’à démolir les trois premiers.
La composition de l’élite n’est pas plus satisfaisante. Elle découle de trois sources : le concours, l’élection, et la cooptation.
La voie du concours souffre d’un malthusianisme forcené, et d’une inadaptation des formations aux exigences du monde moderne. Sont promus au sommet des administrateurs et subsidiairement des matheux distingués lors d’une sélection précoce d’un groupe restreint et homogène, jamais remise en question, alors que le monde appartient à la diversité, aux créatifs, aux entreprenants et aux commerçants.
L’élection n’offre qu’un accès temporaire à l’élite dont on sort aussi vite qu’on y est entré si l’on n’est pas protégé par un statut auquel donne accès le concours. La cooptation, sélection par les réseaux, n’est qu’un avatar de la culture des promotions par concours, elle n’assure en rien une ouverture sociale ou une diversité de talents. En définitive, l’élite française n’est plus apte à diriger la France, sa principale efficacité consiste à pérenniser les privilèges dont elle jouit. Elle n’est plus une élite mais une communauté de profiteurs.
“L’Etat ne peut pas tout“, déclare Lionel Jospin le 13 septembre 1999.
« Michelin annonce un plan de restructuration préparant la suppression de 7 500 postes. Alors Premier ministre depuis deux ans, Lionel Jospin lâche au JT de France 2 une phrase qui lui coûtera cher : « Il ne faut pas tout attendre de l’Etat [...]. Je ne crois pas qu’on puisse administrer désormais l’économie. [...] Tout le monde admet le marché. » Avec ce qui est pris pour un aveu d’impuissance à l’époque — seule l’idée que l’Etat ne peut pas tout sera retenue — Lionel Jospin introduit en réalité son idée d’une social-démocratie. Celle-là même que Manuel Valls dit « assumer » aujourd’hui » écrit le Nouvel Obs ce 30 avril 2014.
Il est vrai que, ce jour de septembre1999, le socialiste qui était Premier Ministre de la France brise un tabou. Depuis, l’impuissance de l’Etat est devenue une rengaine dont les refrains sont que les politiques sont impuissants face à la mondialisation, que l’Europe impose sa loi tatillonne, et que l’Euro prive la politique économique de l’essentiel de ses moyens d’actions, c’est à dire dévaluer. La dévaluation compétitive a beau se parer des plumes de la modernité, elle consiste à annuler les effets de la redistribution sans le dire. Par l’inflation qu’elle induit, elle diminue les revenus de ceux qui n’ont pas de pouvoir de négociation : retraités, salariés, titulaires de prestations sociales…
N’en déplaise au Nouvel Observateur, c’est bel et bien un aveu d’impuissance parfaitement justifié que livre Lionel Jospin. Baptiser ce constat du joli nom de social-démocratie, au demeurant pléonastique, car comment imaginer une démocratie non sociale, ne change rien. L’hyper-Etat ne peut pas tout, et pour être objectif, il ne peut plus grand-chose, et en se mêlant de tout, il peut surtout mal faire.
Les raisons de cette incapacité de l’Etat de répondre aux défis du monde tel qu’il va, ou si l’on est pessimiste tel qu’il ne va pas, ne sont pas dans l’impéritie des dirigeants politiques ou dans une fatalité spécifiquement française. Elles résident dans ce que l’on peut définir comme le martyre de l’obèse. L’Etat est devenu un grand corps podagre, il tient son impotence de sa boulimie. Tel un malade de la goutte ses extrémités le font horriblement souffrir. Les petits privilégiés du système étatique ne cessent de récriminer. La malédiction est que bien que paralysé, sa nature d’outre-mangeur pousse l’hyper-Etat à accroitre sans cesse son embonpoint. Et la consommation pâtissière de millefeuille n’arrange rien.
De fait, l’Etat, reconnaissant son inaptitude n’a plus aucune légitimité pour exiger des citoyens des contributions de plus en plus élevées. C’est donc à une cure drastique d’amaigrissement que l’Etat doit d’urgence se soumettre en se recentrant sur ses missions régaliennes, à l’exclusion de toutes autres.
La Cour des Comptes le dit, par la voix de son Président, le socialiste Didier Migaud, un 5000 non énarque, il y a trop de fonctionnaires.
Il n’est pas le seul. Sur le site officiel de l’Etat “Vie publique“ en ligne le 12/12/2012, on peut lire : « L’évolution de long terme: l’augmentation des effectifs de la fonction publique. Ceci s’explique d’abord par l’accroissement, depuis le deuxième tiers du XIXe siècle, avec une accélération après 1945, des interventions économiques et sociales de l’État, qui ne se limitent plus aux seuls domaines régaliens. Quant aux collectivités territoriales, l’augmentation des effectifs de fonctionnaires s’explique par le mouvement de décentralisation qui, depuis 1982, transfère des compétences de l’État aux collectivités. Aujourd’hui, donc, les effectifs de la fonction publique constituent une charge importante pour les personnes publiques et un souci constant. Ainsi, pour l’État, les traitements et les retraites versés aux fonctionnaires représentent plus de 40% de son budget. » .
La vraie question n’est pas celle de la qualité du service public, mais celle de l’extension déraisonnable du champ d’action de l’hyper-Etat.
La revue parlementaire a lu Les Cinq-Mille , elle y a vu un « elite bashing », il serait impensable de critiquer l’hyperélite. Nos responsables sont aux yeux des scribes du parlementaire tous des irresponsables. Malgré ces réserves le commentaire conclut : « La charge est sévère (et facile), mais loin d’être toujours injuste ». Apparemment, il n’est pas si facile de critiquer les 5000, mais venant de leurs auxiliaires zélés ce compliment vaut une légion d’honneur. On aurait adoré un commententaire sur la manière abondamment traitée dans l’ouvrage dont leurs lecteurs parlementaires sont dépossédés de leurs rôle par les 5000, mais là aussi le sujet est tabou. Jusqu’où le déni de réalité conduira les gardes du temple ?
http://www.larevueparlementaire.fr/pages/RP961/rp961-kiosque.html
À quoi bon dénoncer la gestion de la France par les 5000 ?
Quand le bateau coule, faut-il se taire ? Les 5000 n’ont pas entamé leur autocritique, ils étaient dans le déni de réalité, ils sont dans le refus de responsabilité. Leur emprise sur la société est telle qu’ils sont à l’abri de la précarité générale, et prohibent la mise en cause de leur action. Il est même interdit d’en parler. Par leur pouvoir sur les communicants, ils nomment populisme la moindre critique à leur endroit…. Silence, on détourne la démocratie.
Que faire ? La Révolution ?
Commençons par partager le constat le plus largement possible, et on en fera l’économie. Puisque les 5000 ne consentent pas à un minimum de lucidité, montrons leur qu’ils n’ont pas définitivement gagné la bataille des idées. Nommons les 5000, montrons les du doigt, et leur pouvoir s’effritera car il est fondé sur des privilèges sournois. Discutons de leurs prébendes. Rien n’est irréversible. Le vrai mal français est que personne n’a mis en examen les 5000 devant le tribunal de l’opinion. Tel est l’ambition du collectif Simplicius Aiguillon, dont les deux auteurs, porte parole et rédacteur, sont Thierry Merle et André Touboul.
Qui est Simplicius Aiguillon ?
C’est un collectif ouvert. Tout ceux qui le souhaitent peuvent apporter leur concours à la solution des problèmes qui assaillent et étouffent la France. Thierry Merle et André Touboul ont rencontré et pris les avis de nombre d’entre eux, traduits dans le livre Les Cinq-Mille, Fortune et faillite de l’élite française. Chacun donne à sa participation la forme qu’il souhaite… Un soutien moral, une information sur les 5000, une suggestion pour en sortir, une action concrète pour la diffusion des idées d’Aiguillon… C’est ainsi qu’à été crée ce blog et la campagne d’affiches pré-parution… Le livre n’est pas facile à trouver en librairie… Sans doute l’éditeur a-t-il voulu jouer la carte de la rareté… Faut-il y voir la main des 5000 ?
L’élite se définit par la conjonction d’un mode de sélection, d’une gamme de compétences et d’un champ de responsabilités. L’hyper-élite française est le résultat d’une sélection précoce, inégalitaire, très restreinte en nombre et en origine. Elle a des compétences limitées à des formations principalement administratives, et accessoirement mathématiques ou managériales. Ses responsabilités sont à la fois éludées et tentaculaires.
Les 5000 jouissent des privilèges attachés aux responsabilités dont ils refusent d’assumer les conséquences. Ils n’ont pas toujours les compétences requises mais imitent ceux qui les ont. Quand à la sélection, on compte des intrus qui tôt ou tard sont rattrapés par la patrouille au premier écart de conduite, qui n’est souvent qu’une simple faute de goût.
Devant la débâcle des politiques, les 5000 ne sont-ils pas le seul recours ?
Poser la question ainsi expose à confondre l’effet avec la cause. Dans le monde réel, les politiques n’inventent rien, ils vont chercher leurs idées dans les Think Tanks, les cercles de réflexion, chez les hauts fonctionnaires. Ils ne font que tenter de vendre les recettes agréées par les 5000. Ce ne sont pas les politiques qui sont devenus idiots, mais les solutions conçues par les 5000 qui sont inadaptées, obsolètes, invendables et pour tout dire toxiques.
Les 5000 sont pris au piège de leur propre discours. Ils ont construit une image de ce que les Français peuvent ou ne peuvent pas accepter qui interdit de procéder aux réformes indispensables d’adaptation au monde moderne.
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Ni droite ni gauche, n’est-ce pas une forme de droite honteuse ?
Quand on fait une analyse sociologique, la moindre des choses est de rechercher l’honnêteté de ne pas tomber dans le manichéisme ou le militantisme. La vie réelle n’est ni de droite ni de gauche, elle est. Il faut faire l’effort de ne pas interpréter les faits de société comme s’il s’agissait d’un match PSG/OM.
Le bien et le mal ne se répartissent plus aujourd’hui comme au 19ème siècle. En France, l’hyper-élite des 5000 vit et fait vivre sur des schémas vieux de plus d’un siècle.
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Si on en fait une lecture populiste, le livre ne fait-il pas le jeu du Front National ?
Il y a des spécialistes de la lecture entre les lignes qui oublient de lire ce qui est réellement écrit. Parfois cette attitude est une réaction de défense pour rejeter ou ne pas examiner et débattre d’une idée qui dérange.
Aujourd’hui les deux mots les plus employés dans les médias sont “Voilà“ et “populisme“. Quand on ne sait pas classer une idée à droite ou à gauche, ou qu’on ne la comprend pas on la taxe de populisme. Cela clôt le débat.
Mais parlons du Front National. Les caciques du Front sont des énarques, des 5000 comme dans tous les autres partis. La tentation boulangiste est une vielle affaire en France, elle prospère dans l’ambiguïté et se termine toujours en fiasco parce que les solutions miracle ne sont jamais praticables… Sortir de l’euro, fermer les frontières… yaka… de la politique du Bistro du commerce… on pense à ce fameux gribouille qui se réfugiait dans la mer pour éviter d’être mouillé par la pluie….
En toute hypothèse la description de la France des 5000 n’est pas du populisme ni du poujadisme, ni quelque autre mot en “isme“. Le trop d’impôt est une évidence, le mauvais emploi des deniers publics devient insupportable. Désigner les responsables de l’état de la France est un devoir. Il faut donc dire que l’hyper-élite française est ringarde, prévaricatrice dans l’âme et incapable proposer des solutions pour en sortir au personnel politique qu’il soit de droite, de gauche ou aux extrêmes.
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D’où viendra la solution ? Proposez-vous des solutions ?
On confond trop souvent le registre de l’analyse avec celui des remèdes. Si nous sommes d’accord sur le constat, les solutions apparaissent d’´elles-mêmes. Mais pour déterminer les meilleures mesures à prendre l’analyste n’est pas forcément le plus qualifié. L’erreur fatale serait d’exiger de lui qu’il énonce des solutions et de se servir de la critique légitime ou pas de celles-ci pour perdre de vue le diagnostic.
Le médecin vous dit de quelle maladie vous souffrez, le médicament est du ressort de la pharmacopée. Une fois que les solutions sont sur la table on peut revenir à l’analyste pour éclairer le choix. Mais d’abord et avant tout il faut s’accorder sur l’origine du mal.
En réalité, la première des solutions est celle utilisée dans le monde de l’entreprise pour résoudre un problème on commence par une phase de sensibilisation. A cet égard, le livre qui place l’hyper-élite devant ses responsabilités participe à la solution.
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Un livre peut-il changer quelque chose?
Parfois un seul mot le peut. Le mot juste, prononcé au bon moment. C’est le rapport dialectique entre les faits et les idées.
Le sentiment d’impuissance du citoyen, devant une situation sur laquelle il n’a aucune prise, finit toujours par trouver un exutoire.
Il en résulte le pire ou le meilleur.
N’excluons pas le fait qu’il existe des 5000 de bonne foi, sincères et l’on sait que l’intelligence ne leur fait pas défaut.
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N’avez vous pas le sentiment de cracher dans la soupe ?
Sans jouer les lanceurs d’alerte qui trahissent une confiance qu’on leur a accordée, de tous temps, la lucidité a été d’abord pratiquée de l’intérieur, ou par des personnes assez proches du système pour en comprendre les mécanismes, et si l’on est plus sévère les tares.
Quand la soupe est immangeable, cracher dedans ne change rien, par contre faire observer au cuisinier qu’il ne remplit pas son office est un devoir qui relève de l’instinct de survie.
Les Français découvrent une réforme des régions venue d’en haut, taillée sur mesure pour et par l’hyper-élite décrite dans le livre « Les Cinq-Mille, Fortune et faillite de l’élite française » paru le 15 mai 2014.
La grille de lecture proposée par les auteurs Thierry Merle et André Touboul, réunis par l’initiative citoyenne Simplicius Aiguillon montre pourquoi il serait vain d’en attendre des économies ou une réponse au marasme économique qui frappe la France.
Dans l’ouvrage Les Cinq-Mille, Fortune et faillite de l’élite française, les auteurs ont fourni, dès avant le scrutin, les raisons du score du Front National qui sans programme réel capitalise le rejet des discours et méthodes de l’hyper-élite française. Une invitation adressée aux 5000 de prendre conscience de leurs responsabilités.