L’incapacité de la France à s’adapter aux mutations qu’exige la mondialisation a pris une telle profondeur que même certains membres de l’hyper-élite se rendent à l’évidence et sortent de leur attitude de déni de réalité.
Ainsi, dans son ouvrage La France au défi, l’énarque Conseiller d’Etat, Hubert Védrine décrit un « pays irréformable« , et il tente d’aller au delà du constat de l’état de la catastrophe. Il pointe un problème psychologique, et s’il ne se revendiquait de gauche il écrirait « sinistrose« , mais il ne s’agit là que d’un symptôme. Il convient de « l’arrogance des élites« . Mais là encore, il ne fait que peindre l’exception française sans en dévoiler les causes.
La solution proposée est une sorte d’ersatz de l’union nationale limitée à quelques réformes essentielles. Le problème est que les prétendues mesures de bon sens sont, soit sans pertinence quant aux vices de fond de la société, soit non opérationnelles car rejetées par ceux qui auraient à les mettre en œuvre.
La lucidité de l’ancien Ministre des affaires étrangères sur l’état des lieux fait une place minuscule à la responsabilité de l’élite à laquelle il appartient. Néanmoins pour un 5000, l’effort est exemplaire et mérite d’être souligné.
“Tous responsables, mais certains plus que d’autres“, conclut le journaliste Philippe Plassard dans un article publié le 22 juillet 2014 sur le site du Point. Il admet que la gauche et la droite ne sont pas exemptes d’erreurs, mais pour lui aussi les responsabilités sont diffuses.
Jusqu’ici, seul Simplicius Aiguillon a situé l’origine du mal français dans sa véritable cause. Celle-ci n’est pas une incapacité congénitale des Français à affronter les grands défis, elle réside dans la formatisation de son hyper-élite, ces 5000 qui prennent les grandes décisions sans savoir où ils nous mènent, qui statuent sur le bien penser et la mal pensance en vertu de critères du 19ème siècle, qui prennent le pouvoir grâce à leurs réseaux plus qu’à leurs compétences devenues obsolètes, et qui n’ont aucune vision d’avenir autre que le maintien de leurs avantages acquis alors que de nos jours rien n’est jamais acquis.
Hubert Vedrine est un 5000 de bonne foi, mais il lui reste un très grand chemin à parcourir pour admettre que la cause des malheurs actuels de la France est son hyper-élite, et que la réforme la plus urgente est celle de ce petit groupe de responsables qui refusent leurs responsabilités.
Pour réformer l’élite, il n’existe que deux voies : la première est de supprimer ses privilèges, la seconde est d’en former une nouvelle. Dans ces deux tâches le rôle de l’Etat, qui se mêle par ailleurs de tout ce qui ne le regarde pas, est essentiel. Retrouver l’égalité de tous devant la loi, dont l’égalitarisme est une grimace trompeuse, est un devoir de la puissance publique, et le contrôle du citoyen doit se montrer intraitable à cet égard, en exigeant la transparence en tous domaines de ceux qui décident pour lui. La responsabilité majeure de l’Etat est l’éducation, certes pour le plus grand nombre, mais aussi en formant à l’excellence de nouvelles élites pour qui le monde moderne des échanges et de l’information ne sera plus un mystère hostile, mais une réelle opportunité.
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