Le pseudo-dérapage de Michel Sapin sur le code du Travail.

Interrogé sur l’incidence de la complexité du droit du travail dans les obstacles à l’embauche, le Maître de Bercy rétorque avec le large sourire qu’on lui connaît : « Le code du travail est trop lourd ? « Il n’y a qu’à le rédiger en petits caractères, il sera moins gros ». »

On refuse d’y croire, et pourtant le fait est là dans toute son obscénité. La réplique de Michel Sapin, membre indubitable de l’élite de France, est traitée par l’Opinion (le périodique) comme un accident de communication. Hélas, cette sortie de route n’est pas un fait isolé, et elle révèle un gouffre vertigineux entre l’arrogance des 5000 et la réalité.

« Le bon mot de Michel Sapin a raté son objectif » surenchérit Arnaud Montebourg. Quel objectif ? Celui de démontrer que le chômage est un sujet de plaisanterie ?

L’attitude ironisante est un réflexe inconditionnel, non seulement d’une certaine gauche face aux critiques qu’elle juge marquées du sceau de l’infamie libérale, mais encore de la quasi totalité de l’intelligentsia française nourrie au lait maternel d’un dogme qui veut que tout salarié soit un prolétaire livré aux appétits furieux et gloutons d’un patronat cynique. Toute entrave à la liberté du chef d’entreprise est ainsi par nature une protection du salarié. L’idée saugrenue que le travailleur puisse être victime à rebours de cette armure de plomb est iconoclaste, et suscite la condescendance, voire l’indignation. Hors de question donc de faire l’inventaire et le partage entre les bonnes et les mauvaises contraintes.

« S’ils n’ont pas de pain, qu’ils mangent de la brioche », lance la Reine de France à l’adresse des mécontents qui secouent les grilles de la monarchie. Quand Michel Sapin, à peine sorti de son Ministère du Travail pour entrer dans celui des Finances, met au mauvais goût du jour la malencontreuse plaisanterie  de Marie-Antoinette, dans un contexte où il se montre impuissant à endiguer le nombre des chômeurs qui augmente chaque mois, son humour indécent empeste une fin de règne où le déni du réel se drape dans une élégance de forme… En l’espèce assez piteuse.

A la vacuité de l’argumentation économique, le Ministre allie un mépris profond des gens privés d’emploi, donc d’utilité sociale, mais à ses yeux bien mal venus de se plaindre puisque l’Etat leur dispense larga manu de confortables indemnités prélevées sur les masses qui travaillent encore au nom d’une solidarité mal répartie dont l’échec économique a créé la raison d’être. Au moins, l’épouse écervelée de Louis XVI n’était-elle pas la responsable directe des misères du peuple de France.

Leave a Reply